Réfugié hier, entrepreneur aujourd’hui

Publié le : 15 février 2019
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Kim est arrivé comme demandeur d’asile dans un centre d’hébergement de l’Armée du Salut, il a suivi des formations avant de gravir toutes les marches. Aujourd’hui à la tête de son entreprise de véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC), il a tiré parti de sa maîtrise de la langue russe et fait désormais découvrir les vignobles de Champagne à des touristes russes. Découvrez avec nous son histoire.

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Réfugié hier, entrepreneur aujourd’hui
Nom, prénom témoignage
Kim
Détail sur la personne
Ancien résident du Nouvel Horizon, à Reims
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En compagnie de trois autres personnes que je ne connaissais pas, j’attendais qu’une voiture vienne nous chercher. Nous étions en Russie, à Saint-Pétersbourg. J’avais 23 ans à l’époque. C’était en 2007. Destination : la France. La voiture ne roulait que certains jours précis, car des personnes nous attendaient de l’autre côté de la frontière.

J’avais pris de quoi manger pour plusieurs jours. J’ai dû traverser la Pologne, l’Ukraine, l’Allemagne, mais j’avais qu’une seule en tête : être en France pour me construire un avenir meilleur.

Je suis né en 1984 et j’ai toujours vécu à Erevan, la capitale de l’Arménie. Mon père est coiffeur professionnel et ma mère, cuisinière. J’ai arrêté mes études, et j’ai essayé de gagner ma vie en devenant chauffeur.

Mais le problème en Arménie, c’est qu’il y a beaucoup de corruption. Il est difficile de trouver du travail si vous ou votre famille n’avez pas d’argent. 
 

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Victime de racisme en Russie

C’était très difficile de supporter cette atmosphère au quotidien et j’ai décidé, en 2007, de quitter le pays. J’ai vendu tous mes objets pour pouvoir payer le voyage pour la France : un voyage qui m’a coûté 3 500$ (3 900 €). Je suis allé à l’aéroport international Zvartnots, à Erevan, pour prendre un vol pour Saint-Pétersbourg. Ce n'était qu'une étape sur une route déjà semée d'embûches. Une fois arrivé en Russie, j’ai travaillé un mois en attendant de trouver quelqu’un pour me faire passer la frontière. J’ai eu beaucoup de difficultés à trouver ma place dans la société russe, j’ai souvent dû quitter un travail à cause de propos et des comportements racistes. 

J’avais décidé d’aller en France car je me souvenais de Jacques Chirac et Charles Aznavour qui inauguraient la Place de France en 2006, à Erevan. Inauguration à laquelle j’avais assisté. 

La première ville française où j’ai posé mes valises bagages c’était Reims. Le passeur m’a demandé de descendre de la voiture en me disant que Reims  "c’est proche de la Belgique", et je pouvais travailler dans les vignes. J’étais devant la gare de Reims et j’ai passé cette première journée en France avec des personnes sans abri. 

J’ai appris le français avec ces personnes, c’était la meilleure école.

A la tombée de la nuit, ils m’ont invité à les suivre au Nouvel Horizon, un centre d’hébergement de la Fondation de l’Armée du Salut à Reims. J’ai finalement réussi à être accueilli et j’y suis resté jusqu’en 2012. Pendant cinq ans, j’ai côtoyé d’anciens prisonniers, des malades, d’anciens professeurs, des personnes qui avaient autrefois une bonne situation … et avec nos difficultés nous nous sommes aidés. J’ai appris le français avec ces personnes, c’était la meilleure école. 

Dès mon arrivée à la Fondation de l’Armée du Salut, j’ai fait une demande d’asile et j’ai obtenu le statut de réfugié. J’avais toujours rêvé de devenir chauffeur. J’ai donc suivi une formation de chauffeur, j’ai obtenu mon diplôme et j’ai passé mes permis de conduire voiture et bus. J’ai fait des stages au sein du réseau de transports en commun du Grand Reims. Initialement il voulait être chauffeur de taxi puis chauffeur de transports en commun.

En 2015, j’ai décidé de créer "VIP Services" ma société de véhicule de tourisme avec chauffeur (VTC) et de me mettre à mon compte comme chauffeur privé. Je propose mes services aux touristes qui veulent aller dans le vignoble. Je vais souvent chercher les clients à l'aéroport. Ce sont des touristes japonais, des russes et quelques belges. 

Alors que je n’avais pas de toit en 2007, aujourd’hui, j’ai un logement et je suis fier d'avoir créé ma société. J’ai réussi à faire venir mes parents en France et nous pouvons maintenant envisager une vie stable et paisible. 
 

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